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Jaffa Yaffo יָפוֹ

Table des matières

L’histoire de la ville de Jaffa

Jaffa est une région située au sud de l’ancien Tel-Aviv-Jaffa en Israël. Elle est considérée comme l’un des plus anciens ports de la côte orientale de la MER Méditerranée. Elle est désignée sous le nom Yaffa en arabe et Yafo en hébreu standard.

Dans l’antiquité, Jaffa n’était qu’un passage sur les routes de l’Orient. Mais au Moyen-Orient, elle représentait une des échelles du Levant. Plusieurs traces de ce passé sont encore visibles de nos jours. Après l’indépendance d’Israël en 1950, la ville portuaire de Jaffa a fusionné avec la ville moderne de Tel-Aviv.

Le nom de Jaffa apparait aussi dans l’Ancien Testament notamment dans les histoires bibliques de Salomon et de Jonas. Dans le Nouveau Testament, il est évoqué dans les récits de Saint Pierre. De même, la mythologie grecque fait mention de Jaffa dans les histoires de Andromède et de Persée.

L’origine du nom Jaffa

Les origines sémantiques du nom Jaffa seraient hébraïques. Étymologiquement, il viendrait de yoffi (écrit יופי) (Joppé) qui signifie « beauté ». Son origine serait aussi liée au mot yaffa qui désigne « belle » en hébreu ou Japho qui signifie agréable, pulchritudo aut decor, dit Adrichomius en hébreu.

Plusieurs légendes font aussi mention de la ville de Jaffa. C’est le cas de l’une des légendes juives qui rapporte que la ville aurait été créée par Japhet, l’un des fils de Noé. Il l’aurait fondé quarante ans après le déluge. De même, un récit de la Grèce ancienne associe ce nom à Jopa, la fille d’Éole, le dieu des Vents.

Par ailleurs, le nom Jaffa apparait dans de nombreux écrits de l’antiquité. Il est cité dans les papyrus de l’Égypte ancienne telle que YP, sur la tablette de Thoutmôsis III, sur les listes de Tell el-Amarna et sur l’inscription deSennachérib. Le géographe arabe Al­-Muqaddasi fait aussi mention de Yaffa dans ses écrits. Jaffa apparait également dans la Bible hébraïque notamment dans le livre de Esdras(3,7). L’appellation utilisée est Yam Yaffo pour désigner la Méditerranée. Dans les actes des Apôtres (Chap.9, 10 et 11), le terme utilisé est Joppé ou Jophé.

L’histoire de Jaffa

Jaffa est un nom qui a traversé plusieurs époques de l’histoire. Revisitons-les ensemble.

La période de l’antiquité

La première mention de Jaffa remonte à 3500 ans. Elle sera ensuite utilisée par les Égyptiens de 1465 av. J.-C. jusqu’à environ 800 avant J-C. Nous retrouvons de nos jours la colline de Tell Yaffa sur le site proprement dit. Elle abrite depuis le XVIIe siècle l’église franciscaine Saint-Pierre de Jaffa. Quant au port naturel de Jaffa, il est mentionné depuis l’âge du bronze moyen par les Égyptiens.

Dans une épître qui date de 1470 av. J-C, le pharaon Thoutmosis III est loué pour ses exploits lors de la conquête de la ville par un subterfuge. Cela fait référence au cheval de Troie qui cachait deux-cents soldats égyptiens. Il était offert en présent au gouverneur chananéen de la cité. Ce nom est aussi mentionné dans les tablettes de Tell el-Amarna.

Yaffo, le nom hébreu de Jaffa se trouve plusieurs fois dans la Bible hébraïque et dans l’Ancien Testament. Ainsi, le livre de Josué considère Jaffa comme une frontière de la tribu hébraïque. Elle est le lieu qui accueille les cèdres venus de Phénicie prévue pour la construction du Temple de Salomon à Jérusalem au Xe siècle av. J.-C. Le point de départ du prophète Jonas pour se rendre à Tarsis est aussi Yaffo. Joppé est cité dans l’Acte des Apôtres. Elle est la ville où se trouve la maison de Simon le corroyeur, l’hôte de Saint Pierre.

Outre les Égyptiens, les Chananéens, les Philistins et le royaume d’Ashdod ont aussi cité le nom de Jaffa dans leurs écrits. Pour eux, elle fait partie des royaumes juifs anciens au temps des rois Salomon et David. Elle est aussi présente lors des rois de Judée.

La période de la domination babylonienne, assyrienne, perse et hellénistique

La cité de Jaffa a connu l’invasion assyrienne sous la direction du roi Sennacherib et la domination des néo-Babyloniens dirigée par le roi Nabuchodonosor II vers 605-604. La Perse Achéménide a aussi dominé toute la région. Durant cette période, la cité est restée pendant un moment sous la domination des Phéniciens de Sidon. Elle était un cadeau offert des Perses au roi de Sidon, Eshmounazar II. Il y bâtit un temple dédié au dieu Eshmoun.

Le roi de Macédoine, Alexandre le Grand (336-323) conquiert aussi la cité et assoit la domination grecque. À la mort de leur souverain, l’Empire est partagé. Jaffa et toute la région devient un champ de bataille entre plusieurs diadoques qui se présument successeurs d’Alexandre. Il s’agit de la dynastie des Séleucides et de l’Égypte des Ptolémée. La région reviendra finalement aux Séleucides.

La période de la domination hasmonéenne

Les Grecs ou les hellénisés qui habitent à Jaffa n’apprécient pas la révolte anti-hellène de Judas Maccabée. Pour faire taire les hostilités, ils vont faire noyer dans la mer un grand nombre de juifs. Judas Maccabée se vengera en attaquant la région. Ils résisteront jusqu’en 147 av. J.-C. où Jonathan Maccabée les vaincra. Plus tard, ils seront vaincus encore une fois par Simon Maccabée.

Sur le plan militaire, Antiochos VII, le roi séleucide possède un grand avantage sur les autres forces en présence. Mais face à l’alliance entre les Romains et les Hasmonéen, il laissera Jaffa à Jean Hyrcan (vers 134 av. J.-C.). C’est ainsi que la ville passe de la domination juive à la domination des Hasmonéen puis à la domination des Hérodiens. Cette période correspond au repeuplement de la ville par les Juifs.

La période de la domination romaine

La période de la domination romaine de Jaffa est marquée par la présence des païens, des Samaritains, des juifs et des chrétiens dans la ville. Lors de la conquête de Pompée en 63 av. J.-C., Jaffa, alors appelée Joppé, sera séparée du reste du pays. Jules César l’a offerte au roi juif Hyrcan II par la suite. Mais Marc Antoine en fait cadeau à son tour à la reine d’Égypte, Cléopâtre.

Jaffa est ensuite sous le pouvoir de Hérode le Grand grâce à Octavien Auguste. La ville est dévastée par les soldats romains lors de la guerre des Juifs en 66 après J-C. selon Flavius Josèphe, 8400 juifs sont massacrés. Mais, les Juifs vont se réorganiser autour du port de Jaffa. Ils y construisent une base navale et attaquent les vaisseaux romains qui se dirigent vers la Syrie et l’Égypte. Après de luttes acharnées, les forces juives sont vaincues par les troupes impériales du commandant Vespasien.

En effet, Vespasien a lancé son attaque en pleine nuit. Surprise, une partie des habitants s’est enfuie par la mer. Leur barque a coulé et les voyageurs se sont tous noyés. Rome annexe ensuite Jaffa sous le nom de « Flavia Joppé ».

Le Talmud rapporte qu’après cette annexion définitive romaine, une communauté juive a continué de vivre près des chrétiens dans la ville. En 135, la révolte juive de Shimon Bar Kochba éclate. Mais, elle est vite maitrisée par l’armée romaine. Après cette répression, les Samaritains agrandissent leur territoire et s’installent sur le littoral et sur Jaffa.

Par ailleurs, le nom de Jaffa est aussi mentionné dans le Nouveau Testament notamment dans le livre des Actes des Apôtres. La ville figure dans le récit de la résurrection de la veuve juive Tabitha par Pierre. De même, la maison de Simon le Corroyeur se trouve aussi à Jaffa. C’est là que Pierre a annoncé l’évangile sur l’égalité entre les Juifs et les Gentils. Cette vision de Dieu sur ce sujet est représentée sur un tableau dans l’église franciscaine Saint-Pierre de Jaffa. Quant à la tombe de la veuve Tabitha, elle est présente à Abou Kabir, à l’est de Jaffa. Elle se trouve précisément dans l’Église orthodoxe russe.

Dans la Mishna, la Gemara et le Talmud, il est cité le nom de plusieurs sages juifs, des amoraim et des tannaïm ayant vécu et mené des activités à Jaffa. Il s’agit de : Rav Adda, Rabbi Hiya Brey deRabbi Adda de man Yaffo, Rabbi Tankhum d’Yaffo, Rabbi Yokhanan (Yudan) d’Yaffo, Rabbi Nakhman d’Yaffo (ou Yaakov de Kassrin). Le cimetière antique de Jaffa abrite de nombreuses tombes juives anciennes.

Les juifs de cette période étaient originaires du pays ou des rapatriés de Cyrène, de Chios, de Thessalie, de Cappadoce, d’Alexandrie… C’étaient des commerçants de parfums et de textiles. Ils confectionnaient aussi des vêtements et d’autres pratiquaient l         a pêche.  

Jaffa était sous le pouvoir des Samaritains durant le IIIe et Ive siècle. Le nombre de la population a diminué avec le temps notamment à cause des massacres et des conversions forcées menés par les empereurs byzantins. La forte présence des chrétiens qui étaient leurs voisins les obligea aussi à quitter la région.

La période médiévale

L’histoire de Jaffa durant la période médiévale est subdivisée en quatre grandes périodes.

La période de la domination de l’Empire byzantin

Plusieurs cultures ont marqué la ville de Jaffa depuis les premiers siècles. La communauté chrétienne qui y vit parlait autrefois le grec et l’araméen. Elle constituait la grande majorité de la population durant la période de l’Empire byzantin ou de l’Empire romain d’Orient. Mais, à partir du VIIe siècle avec l’arrivée des Arabes, la langue parlée le plus était l’arabe.

Saint Cyrille rapporte que Jaffa constituait un port important sous l’administration de Byzance. Elle faisait partie de la province de Palaestina Prima. Au Ve siècle, elle devient un évêché. Elle va se faire même représenter aux conciles de l’Église par deux évêques de la ville, Fidus [en 431] et Elias [en 536].

La période du Califat arabe

En 636, Jaffa est sous domination arabe. Elle est conquise par le commandant du célèbre Amru Ben al-Ad lors du règne du calife Omar ibn al-Khattab. Sous l’étendard de l’Islam, la ville adopte une administration musulmane constituée des califats abbassides, fatimides et omeyyades. Avant les croisés du XIe siècle, quelques Juifs sont revenus vivre dans la ville.

La nouvelle administration choisit la ville de Ramla comme capitale du district de Jund Falastin en lieu et place de la province romaine. Palaestina Prima est annexée à la province de Syrie dont la capitale est Damas. Tous les revenus du port de Jaffa revenaient donc à la ville de Ramla. Avec le temps, les habitants de Jaffa commencèrent à parler l’arabe et la région devint arabe. Elle est restée ainsi jusqu’à la fin de l’hégémonie des Ottomans sur la ville. Jaffa est aussi restée un centre important de la culture arabe lors du mandat britannique au XXe siècle. Elle a même dépassé Jérusalem, Haïfa et Gaza.

La période des croisés

En 1099, les Croisés permirent à Godefroy de Bouillon de conquérir Jaffa. Durant cette période, les califes empêchaient les chrétiens de se rendre sur les lieux de pèlerinage. En l’an 1100, Pise représentait l’armée la plus puissante sur le plan maritime. Elle était aussi un des ports de départ pour le pèlerinage d’Europe. Elle a reçu de Godefroy de Bouillon des privilèges au port de Jaffa. C’est ainsi que le comté de Jaffa est créé par le roi Baudoin Ieret dont la gestion sera remise dans les mains de Hugues Ier du Puiset.

Suite aux accusations d’adultère du comte Hugues II du Puiset avec la reine de Jérusalem, Mélisende, le comté est sectionné et Jaffa est rattaché aux domaines du roi. De fait, le titre de « comtes de Jaffa et d’Ascalon» est désormais attribué aux princes héritiers du royaume de Jérusalem. L’un d’eux, Jean d’Ibelin est l’auteur du fameux codex les Assises de Jérusalem. Benjamin de Tudèle, un voyageur juif d’Espagne affirme n’avoir trouvé qu’un seul juif à Jaffa lors de sa traversée.

Jaffa devient la propriété du roi Richard Cœur de Lion après la bataille d’Arsouf. Saladin tentera de récupérer la ville le 30 juillet 1192, mais sans y parvenir.

Un traité de trêve entre les chrétiens et les musulmans est signé le 2 septembre 1192. Il est appelé traité de Jaffa. Il assure trois ans de paix entre les deux parties belligérantes.

En 1196, le roi Henri II de Champagne offre plusieurs propriétés de Jaffa à l’ordre des Chevaliers teutoniques. La même année, la Jaffa tombe dans les mains du sultan ayyoubide de Damas, Malik Adel. Ce dernier a profité des funérailles du roi Henri à Acre pour tuer plus de deux mille croisés. Mais peu de temps après, l’armée chrétienne reconquiert Jaffa.

Avant de recevoir deux illustres souverains en Terre sainte, l’armée renforce les murs de la ville. Le premier souverain est l’empereur d’Allemagne Frédéric II de Hohenstaufen, le Stupor mundi. Il est aussi le roi de Sicile et de Jérusalem. Le 18 février 1229, il signe un traité de paix avec le sultan Malik Al-Kamel d’Égypte.

Le second souverain accueilli à Jaffa est le roi Louis IX de France. Il arrive en 1250, année de sa libération de captivité en Égypte. Il est accompagné de son épouse Marguerite de Provence. Ensemble, ils érigent une église et un couvent à Jaffa.

La période des Mamelouks

En 1268, la ville de Jaffa est sous le pouvoir du sultan Taher Abou al Fatah Baybars. Il a conquis la ville sans combattre après ses victoires sur les Mongols et sur les Croisés en Palestine. Le sultan annexe Jaffa à l’Égypte des Mamelouks. Il détruit plusieurs constructions et ordonne l’exécution d’une grande partie de la population. Seules deux tours sont laissées pour servir à ses soldats.

La ville a continué à servir de ports de pèlerinage aux chrétiens d’Europe pendant le XIVe siècle. Cependant, on note une décadence de la ville pendant les deux siècles suivants. En effet, la ville sera à nouveau détruite en 1345 sur ordre du sultan mamelouk pour empêcher qu’elle serve de base pour une nouvelle croisade. Le voyageur chrétien Cotwyk et le Rabbin Mechoullam de Voltera rapportent qu’ils ont trouvé Jaffa en ruines à la fin du XVe siècle.

Jaffa sous domination ottomane [1516-1918]

Malgré une période sombre du XIVe au XVIe siècle, Jaffa possède encore de la valeur aux yeux des commerçants de la région et des pèlerins chrétiens vers la Terre sainte. La Palestine est conquise en 1516 par le sultan ottoman Selim Ier.

En 1647, Balthasar de Monconys a séjourné à Jaffa. Il y découvre de grandes constructions telles que des cavernes creusées dans le roc et un château. De même, il y voit des barrages de bois érigés par les moines de terre sainte.

La ville de Jaffa retrouve une seconde vie à partir du XVIIe siècle. On y retrouve des églises, une mosquée, et une hôtellerie arménienne construites par les moines franciscains. Cette dernière est destinée aux pèlerins. La ville devient ainsi un centre de quatre cents maisons sans remparts extérieurs.

Le XVIIIe siècle marque une période de réaménagement de la ville. Au milieu de ce siècle, le gouverneur de Gaza, Hussein ben Radwan met en place une politique favorable pour les communautés chrétiennes et leurs pèlerins. Son objectif est purement économique. En effet, près de quatre mille pèlerins chrétiens, sans compter les pèlerins juifs, visitent Jaffa en une année. Dans la même dynamique, le rabbi Yaakov Donama ouvre en 1753 une hôtellerie pour accueillir les pèlerins juifs.

Ce développement de la ville au XVIIIe siècle classe Jaffa devant Ramle qui est le chef-lieu administratif du district. En revanche, la ville connait une nouvelle période sombre de son histoire à la fin du XVIIIe siècle. Ces troubles commencent dans les années 1770 avec les affrontements entre le gouverneur de la Galilée, Dahar al Umar et ses opposants du Liban, de Damas et de la Palestine. Il bénéficie du soutien de flotte russe. Cela lui permet d’arriver aux portes de Jaffa et de siéger dans la ville pendant sept mois.

En 1776, le bey Mouhammad Abou Dahab marche avec son armée au sud de la Palestine. Il est confronté à une résistance farouche à Jaffa. Après plus de deux mois de combat sans succès, il décide d’élaborer une stratégie très rusée. Il propose un traité de paix aux assiégés qui acceptent l’accord. Pendant que les habitants fêtent la nouvelle, il introduit son armée et met à sac toute la ville. Il ordonne d’exécuter près de mille cinq cents hommes. Les têtes des décapités sont enterrées au pied d’une colline appelée aujourd’hui Tel al-Rous.

La période du général Bonaparte à Jaffa

La ville de Jaffa tentera de se reconstruire après les massacres perpétrés par Abou Dahab. Malheureusement, elle connaitra en 1799 la domination du général Napoléon Bonaparte et ses troupes. Selon les témoignages reçus, Bonaparte aurait imposé un ultimatum à la ville. Mais ses messagers furent torturés, émasculés et décapités. Leurs têtes ont été exposées et empalées sur les murs de la ville.

Furieux, Napoléon Bonaparte lance une offensive et réussit à conquérir Jaffa. Les populations présentes connaitront un sort atroce. En effet, la ville a été mise en feu et à sang. Les femmes sont violées et le gouverneur turc Abdallah bey est tué.

Pour des raisons économiques, le gouverneur français ordonne l’exécution des prisonniers turcs. D’après une source, ils étaient environ 4100, selon une autre 2 440. On retrouve parmi eux, un grand nombre d’Albanais. Cependant, il a permis à plusieurs Égyptiens qui vivaient dans la ville de partir.

Napoléon Bonaparte pensait pouvoir intimider les villes voisines de Jaffa. Ayant appris ces atrocités, les défenseurs des autres villes résistaient avec hardiesse aux troupes françaises. L’autre résistance rencontrée par les soldats de Bonaparte était une épidémie de peste bubonique. Elle fit des ravages dans la population et chez les Français.

Face à cet obstacle naturel, il ordonne aux médecins de faire injecter des doses mortelles de laudanum aux soldats touchés par l’épidémie. Plusieurs médecins, dont le Dr René Desgenettes, refusent. Finalement, il abandonnera la ville surtout après son revers au nord du pays par les Turcs. Les murs de la ville seront reconstruits par la Palestine et les Anglais sous l’impulsion du commandant Sidney Smith.

Après un nouveau siège de neuf mois, la ville de Jaffa est conquise dans les années 1800-1814 par Ahmed Pacha. Il est le gouverneur de la ville d’origine bosniaque. C’est lui qui avait opposé une résistance farouche à Napoléon Bonaparte à Acre. Il est connu pour sa cruauté et son passé de bourreau en Égypte. Il est d’ailleurs surnommé Djezzar Pacha, ce qui signifie boucher en arabe.

Jaffa sous le pouvoir de Abou Nabout

La ville de Jaffa connait une période de réhabilitation sous le pouvoir du gouverneur mamelouk entre 1810 et 1820. Il s’agit de Mouhammad Agha, dit Abou Nabout. Ce dernier est connu pour sa cruauté. Durant son règne, la mosquée Mahmudieh est construite en 1812 avec une fontaine rituelle pour les voyageurs. Il fortifie les murs de la ville, aménage les marchés, construit une porte à l’entrée est et ouvre des consulats étrangers.

Sous le gouverneur Abou Nabout, plusieurs Juifs reviennent s’installer à Jaffa. Señor Yeshayahu Ajimen de Stamboul décide d’ouvrir une auberge, une synagogue et une école juives-beyt midrach en 1820. Le nombre de juifs va augmenter avec le temps et en 1838, les Juifs du Maroc vont s’installer aussi à Jaffa. Ils vont créer un quartier à côté de l’auberge. On dénombre en 1818 près de six mille habitants arabes dans la ville. Une fois devenue pacha, Abou Nabout va étendre son autorité sur Gaza et sur Jérusalem.

Jaffa sous la domination de Ibrahim pacha

Ibrahim pacha est le souverain qui a régné sur la Palestine et Jaffa entre 1830 et 1840. Il est le fils du vice-roi d’Égypte, Mouhammad Ali, fondateur de la dernière dynastie royale d’Albanie. En 1846, Ibrahim est reçu à Paris et accueilli en Égypte comme un héros.

Cette présence du souverain égyptien permet à Jaffa de s’épanouir sur plusieurs plans. En effet, Ibrahim Pacha construit une base navale égyptienne, développe la culture d’orangers et de limons, fonde des quartiers loin des murs de la ville. Il s’agit de Sakhanat al Masriye, Sakhanat, Abou Kabir et Sakhanat Darwish. Ces quartiers sont constitués des colons fellanhs arabes d’Égypte.

En 1837, Jaffa connait est secouée par un terrible tremblement de terre. Il a fait des ravages dans la ville. Il a détruit plusieurs maisons. Les Égyptiens vont se retirer de la ville sous la pression des puissances européennes. Jaffa va grandir après cette retraite sous le pouvoir central ottoman. Une petite communauté de 122 juifs se développe dans la ville sous la direction du rabbin Yehuda mi’Ragusa à partir de 1840.

La présence des colons protestants Orangers de Jaffa

La population présente à Jaffa au milieu du XIXe siècle est constituée de près de cinq mille habitants dont les Arabes musulmans, les chrétiens (surtout Grecs orthodoxes, mais aussi Grecs-catholiques, Arméniens, maronites, et quelques catholiques latins, etc.) et quatre cents juifs majoritairement les séfarades.

Sous le régime des capitulations après 1840, le sultan ottoman offre plusieurs privilèges commerciaux et juridiques au sujet des puissances européennes. Les consulats étrangers et les chefs de diverses Églises jouissent d’un grand pouvoir à Jaffa. Les pèlerinages des chrétiens, notamment ceux des protestants se multiplient.  

Plusieurs compagnies commerciales et Églises avaient tenté sans succès de s’installer dans la ville. Il s’agit des colons millénaristes allemands de Rhénanie et américains de Philadelphie de Mount Hope (le mont de l’Espérance) (1853-1857) et des missionnaires de l’Église du Messie (Church of the Messiah), venus du Maine (États-Unis) dans les années 1866-1868. Les missionnaires britanniques, anciens luthériens du Wurtemberg réussissent à s’installer à partir de 1869.

La présence de la colonie allemande à Jaffa

Les Juifs arrivés en Palestine avant la grande vague d’immigration des réfugiés juifs ont œuvré beaucoup au développement du pays. Ils ont drainé les marécages, planté des champs, des vergers et des vignes. Ils ont utilisé des pressoirs à huile et des minoteries à vapeur pour développer l’agriculture. Ils sont aussi les constructeurs des premiers hôtels et pharmacies sous le modèle européen.

Ils sont aussi les premiers à fabriquer en Palestine du ciment, de la bière, du savon… Ils créent ensuite des quartiers à Jaffa en 1869 et dans d’autres villes du pays. Ils fondent aussi la colonie agricole de Sarona en 1871.

Les juifs de Petah Tikva situé au nord-est plantent aussi des vergers d’orangers qu’ils commercialisent sous le nom de « Jaffa Oranges » à travers le port de Jaffa. C’est ainsi que Jaffa devient un centre de la culture d’agrumes en Palestine.

Lors de leur pèlerinage en Terre sainte, l’impératrice Augusta-Victoria et son époux le Kaiser Guillaume II passent des jours dans l’hôtel du parc de Jaffa. Ils rencontrent Theodor Herzl et la communauté allemande des Templiers. En l’honneur de leur empereur, ces derniers donnent le nom de Wilhelma à leur nouvelle plantation à l’est de Jaffa. Ces colonies allemandes quitteront le territoire après la Deuxième Guerre mondiale.

La fin de la domination ottomane à Jaffa

Dans les années 1860, on note une période d’instabilité marquée par des attaques et des pillages de tribus bédouines de la localité. Sous l’impulsion des autorités turques, la région retrouvera son calme. La ville de Jaffa est classée dans les années 1870 dans la catégorie de sandjak de Kouds. La population de la ville s’accroit entre 1868 et 1879. C’est à cette époque que les remparts de la cité sont détruits. Les autorités construisent des institutions d’enseignement et de soins.

De fait, une école est ouverte en 1882 par la Congrégation des Frères des écoles chrétiennes de France. Elle est nommée collège Saint-Joseph. Elle va beaucoup contribuer à la promotion d’une éducation scolaire de qualité en français.  

En 1870, un hôpital français ouvre ses portes à Jaffa. À cela s’ajoutent un hôpital gouvernemental et plusieurs hôpitaux des autres confessions religieuses. En l’honneur des vingt-cinq ans de règne du sultan Abdülhamid II, une tour à horloge est érigée entre 1900 et 1906 au centre de Jaffa.

Construction de la voie ferrée Jaffa-Jérusalem

Pour accueillir l’empereur de l’Autriche-Hongrie, François Joseph Ier en 1869, une voie pavée quittant Jaffa pour Jérusalem est construite. L’année 1892 voit l’achèvement de la première voie ferrée de Palestine. Elle relie ces deux villes. L’initiative du projet vient de l’entrepreneur juif Joseph Navon de Jérusalem. Il a travaillé avec le Suisse Johannes Frutiger et l’ingénieur chrétien arabe Georges Franjieh. Navon attendra trois ans avant d’obtenir l’autorisation de réaliser ce projet le 28 octobre 1888.

Navon ressent le besoin d’être épaulé dans le projet. C’est ainsi qu’il cède ses droits à une société française et à d’autres hommes d’affaires d’Europe. Lui-même conservera une partie des actions. La société qui prend en charge le projet est la Compagnie de Travaux Publics et Construction de Paris. Elle prend deux ans (1890-1892) pour finir les travaux. La voie ferrée Jaffa-Jérusalem est inaugurée en présence d’un délégué officiel du sultan le 26 septembre 1892.

La première locomotive du premier train qui emprunte la voie porte le drapeau de l’Empire ottoman. La voie mesure 87 km de long avec une largeur d’un mètre. L’itinéraire du train est : sud-est de Jaffa — gares de Lod et de Ramle — Wadi a-Srae — Sejed — Vallée de Rephaim à la gare de Jérusalem. Cette voie ferrée représente le premier chemin de fer du Proche-Orient en dehors du court chemin de fer de Perse.

Le développement de la ville de Jaffa fait émerger la construction de nouveaux quartiers arabes. Il s’agit d’Al Ajjami, Jebalya et Manshiye. De même, la sécurité des habitants devient une priorité des autorités. Cela favorise l’essor du commerce dans la région. Ainsi, des boutiques et des ateliers se multiplient dans la ville.

L’émergence du nationalisme arabe à Jaffa

L’essoufflement de l’Empire ottoman favorise l’émergence de nouveaux mouvements tels que le patriotisme arabe local, les Jeunes-Turcs et la croissance de l’immigration juive. Les pionniers de ces mouvements sont généralement des arabophones ou des chrétiens arabes.

Parmi eux, on retrouve deux cousins Arabo-chrétiens orthodoxes, Youssouf al’Issa et Issa Da’oud al Issa. En 1911, ils éditent à Jaffa le quotidien nationaliste arabe Filastin qui milite sur l’identité locale arabe palestinienne.

Par ailleurs, le Parti Patriotique Ottoman voit le jour à Jaffa. Il est farouchement opposé à la vente des terres aux Juifs. Des voix comme celui du député au Parlement ottoman Hafez Bey al-Sayid s’élèvent pour interdire l’immigration juive. C’est ainsi que l’Association islamo-chrétienne nait en novembre 1918. Elle est constituée des notables arabes de Jaffa et un nombre considérable de chrétiens. Elle promeut l’autonomie arabe et milite contre le projet sioniste.

Jaffa, centre du mouvement sioniste en Palestine

Au milieu du XIXe siècle, la situation des Juifs en Palestine devient inquiétante. Les dirigeants juifs de la Diaspora se préoccupent de la qualité de l’éducation des Juifs en Palestine. En effet, ces derniers sont les gardiens des textes sacrés. Ils bénéficient des dons des juifs qui se trouvent un peu partout dans le monde. En 1855, le philanthrope juif anglais, Sir Moses Montefiore achète une plantation d’orangers à Jaffa après plusieurs visites. Son objectif est de trouver du travail aux juifs de la ville. Mais le projet échoue. C’est à ce lieu précis que surgit le quartier Montefiore à Tel-Aviv.

En 1869, une école agricole juive, Mikveh-Israel est fondée à l’est de Jaffa. Elle est l’œuvre de l’Alliance israélite universelle (AIU) de Paris, une organisation philanthropique. Elle bénéficiera de l’aide de son délégué à Jaffa Charles Netter.

Jaffa devient à la fin du XIXe siècle le centre principal du mouvement sioniste en Palestine. En effet, plusieurs mouvements présionistes se sont développés dans la ville. Il s’agit de Hibat Tzion dont les militants viennent de l’Europe centrale et de l’Europe orientale. Jaffa représente pour ces centres de recrutement un point de chute en Palestine. Plusieurs institutions verront le jour à Jaffa pour faciliter l’intégration des immigrés. Nous avons entre autres l’hôpital Shaar Tzion du mouvement B’nai B’rith (1890), le gymnasium hébraïque Herzliya (1905), l’école de formation d’institutrices E. Levinsky, etc.

Entre 1890 et 1891, Vladimir Zeev Temkine achète des terres aux immigrants juifs. Ainsi, plusieurs Juifs du Yémen s’installent au nord de Jaffa et fondent le quartier Kerem Hateymanim en 1904. D’autres quartiers verront aussi le jour ces années-là à l’intérieur de la ville et dans ses environs.

Des associations et des institutions se créent à Jaffa sous l’impulsion des immigrants juifs. Les séfarades et les ashkénazes ouvrent une filiale de la Banque Anglos-Palestine le 26 juillet 1903. Les Juifs accueillent à Jaffa le fondateur du sionisme politique Theodor Herzl en 1898. Il séjourne à l’hôtel Kaminitz de Jérusalem. Le nombre de juifs à Jaffa augmente considérablement. En 1882, ils étaient au nombre de mille. Entre 1895 et 1905, le nombre passe à cinq mille.

Le rabbin Abraham Isaac Kook, un des illustres personnages du judaïsme orthodoxe du XXe siècle occupe le poste de chef rabbin des Juifs de Jaffa entre 1904 et 1921. Le nombre de Juifs à Jaffa se multiplie et en 1908, il atteint huit mille Juifs sur les quarante mille habitants. À partir de cette année-là, Jaffa devient le point de départ de l’organisation de l’émigration juive vers la Palestine. Cette dernière est dirigée par Arthur Ruppin, un délégué de l’Agence juive. C’est lui le fondateur de l’Office palestinien et du bureau de la Compagnie pour le développement de la Palestine.

Des incidents entre Arabes et Juifs se produisent à Jaffa en mars 1908. Plusieurs consuls occidentaux dont celui de l’Allemagne intervient pour apaiser les tensions. Plusieurs manifestations subviennent dans d’autres pays en solidarité aux musulmans de Palestine. Les juifs de Jaffa réagissent de leur côté et fondent en 1909 un nouveau quartier au nord de la ville. Il est appelé Akhuzat Bayit qui deviendra an plus tard Tel-Aviv.

Jaffa pendant la Première Guerre mondiale

Les protagonistes de la Première Guerre mondiale sont les Puissances centrales et la coalition de l’Entente. La ville de Jaffa comptait avant le début de la guerre plus de quarante-cinq mille habitants. La majorité de la population est constituée des Arabes musulmans ou chrétiens. Les Juifs sont minoritaires. Ils sont estimés à huit mille. À Tel-Aviv, ils sont au nombre de mille. On retrouve parmi eux des officiers turcs en mission. À leur tête se trouve le futur fondateur de la Turquie moderne Mustafa Kemal.

Le régime de capitulations est aboli en septembre 1914. De fait, les consuls à Jaffa sont dépourvus de leurs pouvoirs extraterritoriaux. Les Juifs qui possédaient des nationalités étrangères se retrouvent sans droits. Ils sont pris comme les alliés des forces ennemies. Sous ordre de Jamal Pacha, le gouverneur Bakha ad-Din prend la décision de déporter les hommes Juifs de nationalité russe. Cette déportation immédiate prendra fin grâce à l’intervention de l’Allemagne et des États-Unis. Ils décident d’« ottomatiser » ces Juifs au lieu de leur imposer une taxe.

En avril 1917, les Turcs décident de déporter les neuf mille Juifs présents à Jaffa et à Tel-Aviv. Ils se réfugient en Égypte, en Galilée ou dans d’autres régions de la Palestine. Le nouveau gouvernement ottoman ordonne des arrestations et des déportations en masse. Même les Arabes rebelles sont déportés. Ils sont installés dans les tentes à proximité de la ville.

Entre 1917 et 1918, la ville est vidée de sa population. Environ 1500 Juifs meurent de faim et de maladie durant l’hiver 1918. Plus tard, les Arabes regagneront leurs logements. Quant aux juifs, ils y retourneront qu’après la victoire des Britanniques.

L’occupation britannique à Jaffa commence le 16 novembre 1917 avec la pénétration du général Edmund Allenby et ses troupes sur le territoire. Les colons allemands, hongrois et autrichiens qui se trouvaient en Palestine sont tous déportés dans des camps égyptiens. Ils recevront l’autorisation d’y revenir en 1920-1921. Le projet de créer un foyer national juif en Palestine commence en 1922.

L’occupation britannique de Jaffa

Sous l’occupation britannique, la ville de Jaffa abritait une population de trente-deux mille personnes. On retrouve parmi eux cinq mille Juifs. La ville s’est agrandie vers l’est avec la création de nouveaux quartiers comme Al Nuzha. Ce dernier était très animé sur le plan commercial et possédait le grand boulevard King George et l’illustre mosquée Al Nuzha.

D’autres institutions publiques verront aussi le jour à cette période. Il s’agit de l’hôpital Dr Dajani, le cinéma Al Hamra, l’école Hassan Arafe dans les années 1940-1941.

Quant à la vie politique, elle est rythmée par les relations conflictuelles entre la fraction du mufti de Jérusalem, Hajj Amin al Husseini et d’autres fractions et famille. Ce sont ces protagonistes qui mettent fin à l’Association musulmane-chrétienne de Jaffa.

Les émeutes du 1er – 7 mai 1921 à Yaffa

L’année 1921 est marquée par les émeutes arabes. Les manifestants sont contre un projet de création d’un État juif en Palestine. En effet, l’Association musulmane-chrétienne avait présenté une pétition aux Anglais contre le soutien britannique au projet sioniste. Pour l’Association, les Arabes sont contraints d’accepter la présence des Juifs en Palestine à moins de les jeter à la mer ou de se faire pousser vers le désert.

En 1919, l’organisation souterraine arabe « La Main Noire » est créée en vue de « tuer le serpent sioniste » tant qu’il est encore temps. Ainsi, en 1920, les Arabes de Jaffa suivis des Arabes d’autres pays manifestent pour l’annexion de la Palestine au royaume de Damas par Fayçal ibn Hussein.

 Lors de la visite en Palestine du ministre des colonies britanniques Chruchill en avril 1921, il rejette la demande des Arabes de mettre fin au projet sioniste qui était prévu pour le 2 novembre 1917. Cette annonce irrite les Arabes de Jaffa qui organisent une manifestation le 1er mai 1921. Elle est suivie d’une vague de violence et de pillages contre les Juifs. Treize Juifs perdront la vie et vingt-six seront blessés pendant ces émeutes. Dans le quartier d’Abou Kabir, six autres juifs sont massacrés dans un jardin d’orangers. Les raisons qui sous-tendent ces émeutes étaient que les nouveaux venus juifs représentaient une menace du communisme et d’« immoralité ». 

Après quelques jours de manifestations, la police britannique intervient et réussit à bloquer l’avancée des Arabes vers Tel-Aviv. D’autres régions juives comme Petah Tikva, Hadera, Rehovot sont aussi la cible des contestataires. Ils auront gain de cause, car le haut-commissaire britannique Sir Herbert Samuel accepte de limiter l’immigration juive en Palestine en vue d’apaiser les tensions.

Ces événements vont faire fuir plusieurs Juifs de Jaffa. Ils iront à Tel-Aviv qui obtient définitivement son autonomie administrative vis-à-vis de Jaffa. Entre 1929 et 1939, la vie des Juifs de Palestine est menacée. Le 25 août 1929, plusieurs Arabes tentent d’attaquer les Juifs de Tel-Aviv. Ils sont repoussés par la police britannique et la Haganah, une organisation paramilitaire de défense des Juifs.

Première phase de l’Intifada (1936-1939)

La présence de plus en plus grande des Juifs en Palestine suscite en retour des manifestations du mouvement nationaliste arabe. Ce dernier est dirigé par les membres de la famille Husseini de Jérusalem et d’autres politiciens comme le président de l’Association islamo-chrétienne Omar al Baytar, le maire Asim bey al Saïd, ainsi des hommes actifs tels que Adèle Azar, Hassan Arafé et le Dr Fouad Dajani.

D’autre part, la Jeunesse Arabe adopte un programme panarabiste lors d’un congrès national à Jaffa en janvier 1932.   Les membres de cette association organisent des patrouilles le long de la côte pour empêcher le débarquement des immigrants juifs illégaux. Ils incitent aussi les commerçants à observer une grève politique.

De même, les notables arables se réunissent à Jaffa le 20 mars 1933 pour dénoncer les autorités britanniques et les conationaux qui soutiennent l’immigration juive. Une semaine plus tard, les forces britanniques réprimandent une manifestation de masse non autorisée. Moussa Qazem al-Husseini, une figure du mouvement national arabe est grièvement blessée lors de cette répression. Il meurt cinq mois plus tard à l’âge de 83 ans.

Sa mort suscite des révoltes dans le pays. Les nationalistes arabes déclenchent un soulèvement en avril 1936. La révolte est générale et touche même Jaffa. Les manifestants organisent une grève générale et bloquent les routes de Jaffa pendant 175 jours, entre avril et octobre 1936. Les juifs sont violentés du 19 au 23 avril. Cette vague de violences agite toute la population. Les paysans et ouvriers originaires de la ville d’Hauran de Syrie massacrent à Jaffa neuf Juifs et blessent soixante autres. Se sentant en danger, les Juifs de Jaffa fuient la ville et s’exilent à Tel-Aviv. Ils laissent leurs boutiques et leurs activités.

Par ailleurs, on note aussi des représailles contre les Arabes de la part de certaines organisations juives telles que la Haganah et le groupe dissident Irgoun B.

Le 7 août 1936, les rebelles arabes rouent de coups deux assistantes médicales à Jaffa. Ils saccagent les plantations et jardins de Juifs. Face à ces nombreux actes de violence envers les Juifs, les autorités britanniques décident de proclamer la loi martiale le 7 septembre 1936. Les Juifs installés à Tel-Aviv décident d’abandonner le port de Jaffa et d’ouvrir un nouveau à Tel-Aviv. Ces émeutes touchent lourdement Jaffa sur le plan économique.

Deuxième phase de l’Intifada

Le gouvernement du Royaume-Uni met en place la Commission Peel qui propose un plan de partage de la Palestine. Il est proposé en 1937 et recommande que l’autorité britannique dirige Jaffa, Bethléem, Jérusalem et un corridor qui traverse Ramleh et Lydda jusqu’à la mer. Les Arabes palestiniens n’acceptent pas ce plan. Entre septembre et octobre 1937, ils provoquent la deuxième phase de la révolte. Ils s’opposent à l’administration britannique et au projet sioniste en Palestine. Les Britanniques décident d’ostraciser le Haut Comité arabe et ses dirigeants.

Les Juifs subissent des attaques arabes. Les formations radicales souterraines juives Etzel et Lehi répondent par des attentats anti-arabes. C’est le cas de l’attentat du 26 août 1938 dans le marché de légumes de Jaffa. Il a fait vingt-quatre morts arabes et trente-neuf blessés. À l’approche de la Seconde Guerre mondiale, l’administration de Chamberlain décide d’apaiser les tensions. Il annule le plan Pell. En mai 1939, MacDonal publie un « Livre Blanc » qui limite l’immigration juive en Palestine.

Le plan de partage de l’ONU du 29 novembre 1947

 L’ONU met sur pied une commission spéciale en 1947 pour proposer un plan de partage de la Palestine. Elle propose que Jaffa fasse partie d’un futur État juif. À l’Assemblée générale de l’ONU du 29 novembre 1947, les participants recommandent que Jaffa soit inclus dans le futur État arabe palestinien. Étant opposées à la création d’un État juif en Palestine, les Arabes rejettent ce plan. Le 30 novembre 1947, les Juifs subissent trois attentats arabes dans différentes régions du pays.

« À Jaffa, un jeune Juif tombe sous les balles. Nombre de juifs sont tués par des francs-tireurs arabes qui tirent depuis de hauts bâtiments de la périphérie de la ville, comme depuis le minaret de la mosquée Hassan Bek. Des parties des rues commerciales de Tel-Aviv, rue Allenby, rue Ha’Aliya et rue Herzl deviennent des cibles commodes pour ces francs-tireurs. Le commerce juif doit déménager vers le nord de la ville. Des volontaires d’Irak et de Bosnie se joignent aux Arabes locaux sur les tours des mosquées et s’emparent des maisons abandonnées dans des points stratégiques limitrophes ».

Ces attaques vers la rue Allenby suscitent des réactions des combattants de l’Irgoun et du Lehi. Le 1er décembre 1947, une grève de trois jours est déclarée. Plusieurs personnes perdront la vie durant ces jours, dont 70 Juifs, 50 Arabes, 3 policiers et un policier britannique.

Le 8 décembre 1947, des militants arabes de Jaffa et de Salamé mettent le feu à des maisons dans la banlieue juive d’Hatikva. Plus de deux mille cinq cents habitants juifs prendront la fuite. Mais, par manque de stratégie, la Haganah réussit à repousser les rebelles.

Le 9 décembre, un accord de paix est trouvé entre les maires de Jaffa et de Tel-Aviv afin de sauver la culture et l’exportation des agrumes. Cependant, les militants de l’Etzel réussissent à faire une première incursion à Jaffa.

Le 4 janvier 1948, un camion chargé d’explosifs explose près du Sérail de Jaffa. Les Arabes affirment qu’il ne contenait que les civils innocents et des enfants orphelins. Cela attrista énormément les défenseurs de Jaffa et ses habitants.

En février 1948, la défense arabe de Jaffa était constituée essentiellement des membres de l’Armée de libération arabe, environ cinquante moudjahiddin musulmans des anciennes unités Waffen-SS de Bosnie et quelques colons allemands des Templiers.

Déplacement massif de la population arabe

L’année 1948 est marquée par la guerre civile en Palestine. Les Arabes aisés quittent le pays. Jaffa est en souffrance à cause du blocus qui engendre la pénurie des aliments et de l’énergie. Plusieurs attentats menés par l’Irgoun et le Lehi s’y produisent.

La guerre civile se déroule entre les militants de l’Armée de libération arabe et les milices juives à la frontière de Tel-Aviv. La population arabe décide de fuir le temps que les armées arabes triomphent. De fait, le nombre d’habitants a diminué de près de 25 000 personnes en avril 1948.

En fin mars, la Haganah décide de quitter sa position défensive et de passer à l’offensive. Son objectif est de contrôler tout le territoire prévu par le plan de partage de l’ONU avant le 14 mai, date de la fin du mandat britannique en Palestine. Elle souhaite aussi assurer à sa population la sécurité territoriale en conquérant les lieux stratégies laissées par les Britanniques et quelques villes et villages.

La Haganah refuse d’attaquer Jaffa puisqu’elle ne figure pas dans le futur État juif. Elle serait perçue comme une provocation de la part du Yishouv. Elle décide donc de confier cette tâche à l’Irgoun qui théoriquement est indépendant du pouvoir central. Ce groupe dissident juif passe à l’offensive le 25 avril. Il bombarde pendant trois jours le centre de Jaffa. Il est commandé par le commandant d’Amiha Paglin. La population arabe s’est enfuie et s’est réfugiée au sud du centre-ville.

Londres ordonne à ses forces de repousser l ’Irgoun. Elles le font à l’aide des avions et des navires de guerre. L’Irgoun bombarde le bâtiment de la police avant de se retirer de la ville le 28 avril 1948.

Entre le 20 et le 30 avril 1948, la Haganah commence son opération Hametz qui vise à conquérir les villages arabes situés à l’est de Jaffa. Elle réussit sa mission le 13 mai.

Le nombre d’habitants arabes était compris entre 70 000 et 80 000 personnes avant la guerre civile. Après elle le 15 mai, elle n’était que de 4 100 personnes.

Le visage de Jaffa de nos jours

La guerre civile entre Arabes et Juifs de 1948 a laissé beaucoup de traces négatives dans la ville de Jaffa. Des centaines de maisons ont été partiellement ou entièrement détruites. Entre 1948 et 1949, la ville est dirigée par un régime d’un gouvernement militaire israélien, puis par une administration civile spéciale. C’est aussi au cours de cette période qu’une vague successive d’immigrants juifs débarque dans le nouvel État d’Israël.

Les Arabes de classe moyenne s’installent dans la vieille ville aux périphéries de la place Kedumin. Plusieurs d’eux viennent des autres régions arabes dépeuplées et même de Ramleh. Il s’agit d’une zone où règnent la misère, l’insécurité, la délinquance et un niveau d’enseignement bas. Une polyclinique destinée à la désintoxication sera construite à Jaffa en 1970 pour aider ces populations.

En 1960, la Société pour le développement de la vieille ville est construite à Jaffa. Son but est d’améliorer l’état de la ville. Ainsi, de 1960 à 1970, la ville est réaménagée avec l’ouverture des galeries d’art et des ateliers de sculpteurs et de peintres. La place de l’Horloge est aussi refaite. Ces deux endroits deviennent des attractions pour les touristes.

Les boutiques telles que la boulangerie-pâtisserie Aboulafia et les restaurants de hoummous deviennent célèbres dans la région arabe de la ville. Jaffa devient ainsi un centre de vie culturelle et de divertissement au cours des années.

Plusieurs chanteurs célèbres se produisent aussi à Jaffa. Il s’agit des artistes tels que San, Trifonas, Loukas Daralas… On retrouve aussi un café-librairie arabe « Yafa » qui accueille les intellectuels. Le sport se développe également dans la ville. Un grand terrain y est construit et accueille les joueurs de foot.

Ces dernières années sont marquées par le lancement de vastes travaux pour l’aménagement de la plage et la construction d’une ligne de train express régional. Elle relie les zones urbaines de Bat Yam, Tel-Aviv-Jaffa, Ramat Gan et Petah Tikva.