Ce qui est lourd et douloureux pour les disparus et leurs familles, mais pas une ville martyre.
Parlez de Alep, parlez de Beyrouth, parler de Dresde que les Anglais ont bombardé de bombes incendiaires, pour faire un exemple, des bombes qui ont amalgamé et fusionné les chairs au macadam des trottoirs, on parle de 100.000 morts, sans doute beaucoup plus, mais comment comptabiliser ce qui est de l’enfer?
Parlons de l’Arménie, du Congo, d’Afghanistan, enfin partout où des villes furent réellement détruites, réduites en pierres, poussière et flammes, Mais par pudeur, décence et sens commun, ne dites plus que Marseille est une ville martyre pour 6 disparus, fussent-ils une douleur irréversible pour les leurs.
6 disparus, peut-être 8 au final, ne font pas d’une ville une martyre, ou alors les attentats d’islamistes qui ont atteint Paris et Nice par centaines, comment les qualifiez-vous ?
Et d’Israël qui, depuis quelques jours, subit des tirs de missiles et compte ses morts, que dites-vous ? Que c’est un pays martyr ?
Non !
Et d’ailleurs Israël ne voudrait pas. Pas un Israélien ne voudrait aujourd’hui du mot de “martyr”, ni pour lui-même, ni pour son pays.
En conclusion, compatissons à la peine et la douleur, mais ne nous trompons pas de mots.
Dresde et Alep, Beyrouth furent des villes martyres, et hélas tant d’autres, mais pas Marseille, douloureusement et intimement meurtrie aujourd’hui, mais pas martyre.
“Mal nommer, disait Camus, c’est ajouter au malheur de ce monde”. Ce que je crois absolument, parce que par capillarité, consensus et autres dynamiques de groupe, certains mots volontairement mal proposés ravagent les cœurs autant que les méninges.
© Louise Gaggini
Ecrivain, journaliste, mais aussi sculpteur et peintre, pianiste, bref une “artiste plurielle”. Diplômée de lettres, d’Histoire de l’Art et de Conservatoire de musique. Auteur de nombreux dossiers pour la presse et la télévision, dont certains ont été traduits par l’Unesco, des organismes humanitaires et des institutions étrangères à des fins d’éducation et de prévention et d’autres furent diffusés par l’EN, Louise Gaggini est l’auteure d’essais et de romans dont La résultante ou Claire d’Algérie et d’un livre d’art pour l’UNICEF: Les enfants sont la mémoire des hommes. Elle est aussi l’auteure d’essais de société, et expose régulièrement, récemment à New York.
elle a publié son premier roman pour littérature jeunesse en 2001, et son premier roman pour adultes en 2004.
Où la trouver :
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