Après la mort de Hassan Nasrallah, nombre de médias et de personnalités politiques français s’en sont pris à la politique israélienne, sans un mot sur les exactions terroristes sanguinaires commanditées par cet homme, dénonce Gilles-William Goldnadel, Chroniqueur au Figaro.
Les faits. Bruts. Nasrallah, le terroriste islamiste, est mort. Les Israéliens l’ont tué. Il voulait leur mort et la destruction de leur pays. Il était le cerveau comme le bras de la République des mollahs. Il était l’organisateur d’attentats sanglants dans le monde entier – pas seulement en Israël. Au Liban, contre 240 marines américains et 58 parachutistes français, en 1983. En France, rue de Rennes contre le magasin Tati. En Argentine, contre des centaines de juifs. Il aura fait des milliers de morts. Le 8 octobre au matin, il lançait ses missiles sur le territoire israélien, vidant ainsi une grande partie de la population de sa région septentrionale.
Les réactions, à présent – à commencer par celles, subjectives et engagées, de l’auteur juif et français de ces lignes dont on pardonnera l’impudeur. La fierté et le sentiment de justice. Fierté sans doute assez stupide et irrationnelle. Mais ni plus stupide ou déraisonnable que le sentiment d’humiliation qui l’envahit un 7 octobre au matin en même temps que son chagrin. N’étant responsable ni de l’épopée militaire de cette guerre des dix jours qui fera date, ni de la débâcle des services de renseignements de l’État Juif hier.
Et surtout, un sentiment de justice enfin rendue aux victimes du terrorisme le plus épouvantable que le monde moderne ait connu, État Islamique exclu. Mais ce sont les réactions de certains, dans l’univers médiatique et politique, qui continuent de révolter, au lendemain de l’exécution de l’exécuteur des basses œuvres de la République islamique.
Avant que de les dire, disons par quoi elles se caractérisent et qui est la marque de notre temps mauvais : l’absence de tout esprit critique pour la radicalité assassine islamique qui n’a d’égal que la sévérité excessive pour un État occidental, démocratique, agressé et judaïque. Traité avec une rigueur aussi exceptionnelle qu’obsessionnelle. Il s’agit d’une donnée constante que je ne me lasse pas de répéter et que j’explique moins par l’antisémitisme montant que par la haine pathologique de l’Occident descendant.
N’était-ce pas précisément le moment de profiter de l’état de faiblesse de l’organisation despotique pour tenter de modifier l’inéluctable destin dessiné depuis des années ?Gilles-William Goldnadel
Nous n’aurions pas assez d’un livre pour présenter les manifestations les plus flagrantes de cette différence maladive de traitement. Contentons-nous seulement de deux. Le chef défunt du Hezbollah expliquait récemment que les homosexuels devaient être exécutés immédiatement dès le premier rapport sexuel. Un seul journaliste français, ordinairement vétilleux sur le sujet, lui en a-t-il tenu mauvaise rancune ?
C’est que l’homophobie ne peut émaner que du mâle hétérosexuel blanc. Quand un islamiste iranien ou affilié pend un homosexuel, c’est un religieux un peu démodé, mais il n’y a pas de quoi en faire un psychodrame. La journaliste iranienne Maisha Alinejad vient de déclarer : «Lorsque des terroristes tombent, ce n’est pas une tragédie, c’est une victoire». Cette position est celle de presque tous les journalistes iraniens en exil. Elle n’est pas celle de nombre de journalistes français de progrès.
Nous prendrons dans ce cadre les deux exemples médiatiques et politiques qui auront le plus défrayé la chronique. Il s’agit d’exemples nationaux, ce qui montre que la détestation obsessionnelle de l’Occident commence par lui-même. Le portrait du chef terroriste publié par Le Monde du 28 septembre aura en effet légitimement révolté. Pas seulement son titre assez laudateur «Le parcours de Hassan Nasrallah, chef charismatique du Hezbollah», mais plus encore de ce qui se trouvait et de ce qui ne se trouvait pas plus dans cet article que dans l’ensemble des articles publiés par ce quotidien ce jour-là. Ce qui s’y trouvait : une critique en règle de la politique israélienne en général et de son premier ministre en particulier.
Ce qui ne s’y trouvait pas, symétriquement, et au demeurant de manière systématique depuis longtemps : la moindre critique du Hezbollah et de son parrain iranien, ou le moindre rappel des exactions terroristes sanguinaires commanditées par l’homme dont on réalisait la chronique nécrologique. Laquelle indiquait en prime dans sa notice que son fils aîné Hadi était mort en «martyr» dans la plus pure phraséologie islamiste. Le mieux est ne pas écrire ce que celle-ci nous inspire.
Passons à présent à l’aspect politique de nos observations. Contrairement à la semaine précédente, notre président de la République ne s’est pas exprimé. Après l’affaire des bipeurs, celui-ci avait cru devoir s’adresser aux Libanais dans un discours pathétique assez étrange et unilatéral, sans réserve quelconque critique au Hezbollah ni la moindre parole de compassion pour ses victimes françaises.
Serait-ce la raison pour laquelle cette fois, Emmanuel Macron s’est abstenu, alors que pareille allocution lui laisse l’illusion de faire encore impression ? Toujours est-il que le même triste rôle aura été donné à son tout nouveau ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot qui, toujours sans un mot critique pour l’organisation terroriste, se borna à donner de strictes consignes à Israël. On comparera avec l’attitude du président américain qui déclara que l’exécution du chef terroriste était un acte de justice.
Il y a des banalités qui ne font pas de mal. Et sans doute, le souvenir des marines morts suppliciés est plus vivant à la Maison-Blanche que celui, au Quai ou à l’Élysée, des 58 parachutistes français tués à Beyrouth en 1983. Mais il y a quelque chose de plus dérisoire dans l’expression et les raisons de la position française. Passons sur l’obéissance docile à la loi du nombre ou sur la crainte révérencieuse des banlieues islamisées. Et continuons de rappeler le rôle traditionnel que la France ambitionne de jouer encore au Liban.
Dans ce Liban multiconfessionnel, à la souveraineté perdue en raison de la domination du Hezbollah chiite, sans président depuis deux ans, n’était-ce pas précisément le moment de profiter de l’état de faiblesse de l’organisation despotique pour tenter de modifier l’inéluctable destin dessiné depuis des années ? Pour donner la parole aux chrétiens maronites ou aux modérés sunnites dont certains se sont bien davantage réjouis à Beyrouth que d’aucuns à Paris de la fin de la brute sanguinaire, fut-elle charismatique ? Mais pour cela il aurait fallu du courage et de l’inventivité. Et peut-être aussi un peu d’humanité.
© Gilles-William Goldnadel
Source: Figaro Vox
Gilles-William Goldnadel est avocat et essayiste. Chaque semaine, il décrypte l’actualité pour “FigaroVox”. Il a publié “Journal de guerre. C’est l’Occident qu’on assassine” (Fayard, 2024). Il est également président d’”Avocats sans frontières”.
L’article Goldnadel: “Pourquoi une partie de la classe politico-médiatique refuse de voir le leader du Hezbollah pour ce qu’il est… un terroriste ?” est apparu en premier sur Tribune Juive.